Spectacle à faire rire toute la famille, road trip en carton d’un amerloque qui traverse le monde, Les gros patinent bien déborde d’inventivité et de joie scénique.
C’est le genre de spectacle où je me dis que ça ne va pas durer. Où je me demande régulièrement comment ils vont faire pour tenir le rythme et la distance. Un gag toutes les cinq secondes. Du rire en continu. Une histoire simple : un amerloque qui traverse le monde à la recherche de l’amour. Deux comédiens, excellents. Olivier Martin-Salvan, le barbu enrobé, voyageur immobile assis face au public qui baragouine un américain à moitié yaourt à base de gimmicks du genre « okay,all right ». Pierre Guillois, grand mince, en maillot de bain boxer short, torse nu, visage en lame de couteau, qui s’agite inlassablement derrière Olivier en brandissant des cartons qui font bouger les décors et avancer l’aventure. Des cartons mouchoir, des cartons cabane, des cartons paysages, animaux, wc, palmiers… Des cartons qui représentent simplement ce qui est écrit dessus au gros feutre noir. Des cartons qui défilent comme les images d’un cartoon et qui parfois peuvent vous tomber sur la tête ou vous claquer au visage à cause du vent.
En trottinette, en vélo ou sur un baudet
Mais ils y parviennent sans problème. Avec cela, leur énergie inépuisable, leur complicité, leur complémentarité et un plaisir à faire les rigolos qui se voit si fort. Ils arrivent à faire rire sans relâche. À opérer des variations dans la répétition, à repousser toujours un peu plus loin les limites de ce que leur permet le dispositif. Sur un canevas qui se répète : une arrivée dans le pays via une boutique tenue par une femme où l’Américain commande un coca et un cheval et se retrouve avec la boisson de l’étape et un moyen de locomotion à chaque fois différent. Que ce soit en trottinette, en vélo ou sur un baudet, c’est reparti pour une chanson folk américaine et les paysages qui défilent, jusqu’à ce qu’à nouveau surgissent les ennuis. Une tempête ou un avion. Et qu’une sirène intervienne pour le sauver, direction un nouveau pays. Les deux compères qu’on voit là avaient été révélés par Bigre, gros succès de l’année 2015. Pierre Guillois avait ensuite créé un hilarant Operaporno repoussant sans cesse les limites du graveleusement correct. Ils forment un duo physiquement à la Laurel et Hardy du XXIème siècle, aiment le slapstick, humour vache qui tape et fait rire, et ont trouvé cette merveilleuse idée de spectacle en écrivant sur des cartons pour essayer de s’imaginer les éléments de leur mise en scène. Une version scénique pour l’hiver, une version tout-terrain pour l’été, les voilà certainement partis, vu la qualité de leur spectacle, pour une très longue tournée.
Eric Demey